MARIE, CHEMIN D’ESPERANCE
La première en chemin, Marie tu nous entraînes à risquer notre « oui » aux imprévus de Dieu
26 ans, un poste d’assistante à la Fac, une communauté chrétienne étudiante solide et une amie qui propose vacances de Pâques, pèlerinage à Lourdes des enfants malades d’Île-de-France et de leurs familles. Pourquoi pas ?
Nous voilà enrôlées comme « infirmières » je dirai plutôt « aide-soignante animatrice ».
Beaucoup d’enfants porteurs de ces maladies dont on nous parle chaque année au Téléthon ou bien handicapés par des naissances compliquées. Des parents, surtout des mamans épuisées par leur engagement auprès de leurs enfants et qui viennent se poser, prier, espérer et pendant 5 jours nous déléguer leurs tâches quotidiennes. Nous voilà affectées dans une salle sous la responsabilité d’une femme d’autorité, nous apprenons doucement le service. On me confie deux petites filles seules, sœurs, maghrébines musulmanes. On m’apprend que c’est leur assistante sociale qui a eu l’idée du pèlerinage pour les faire sortir de l’hôpital qu’elles ne quittent jamais ; leurs parents, les sachant condamnées, les y ont oubliées ! Nadia 9 ans et Farida 5 ans s’attachent très vite à moi. Nous faisons toutes les activités proposées : elles sont si heureuses de vivre autrement, leurs yeux sont émerveillés par la procession du soir aux flambeaux vers la grotte de la « belle Dame ». Puis vient un après-midi l’activité piscines, j’explique ce que c’est et elles veulent y aller mais avec moi. Nous voilà parties, accompagnées par la litanie du chapelet à la grotte… ; tout se passe bien, je les déshabille, les sèche, les rhabille, elles se tournent vers moi : « à toi Chantal ! » Je n’avais aucune envie de me baigner, elles insistent : « tu nous as fait baigner, tu dois toi aussi le faire. Quelle leçon !
Les jambes flageolantes je me décide ; la froideur du gave me coupe le souffle, une prière monte en mon cœur : « Marie, fais que quelqu’un m’aime et veuille bien faire sa vie avec moi ».
Voilà, nous regagnons la cité Notre Dame, les deux sœurs me donnant la main, fières d’avoir accompli cet acte « héroïque ». Pour moi j’avais le sentiment que l’on ne pouvait rien demander sans donner l’exemple et j’avais, grâce à Marie, vaincu ma peur et partagé mon espérance.
Le pèlerinage se termine. Que de pleurs au moment de la séparation : « tu nous donneras de tes nouvelles… Viens nous voir…. La vie reprend son cours….
En mai, appel de l’assistante sociale : « Madame, vous vous êtes occupée de Nadia et Farida à Lourdes. Nadia fait une rechute, elle ne va pas bien, elle vous réclame beaucoup. Je crois que ça l’aidera à se battre si vous venez la voir ». Et me voilà partie pas très fière pour l’hôpital de Limeil-Brévannes. Je trouve Nadia couchée dans une grande salle, avec une perfusion et une assistance respiratoire. Je n’oublierai jamais son sourire quand elle m’a vue, son visage éclairé par la joie. Elle me reparle de tout ce que nous avons fait à Lourdes, de la piscine, du fait que je ne voulais pas y aller et elle a ri… Je la quitte, inquiète, je lui dis que je prierai la « Belle Dame » pour elle. Les visites n’étaient pas réellement autorisées. Un mois plus tard, l’assistante sociale m’appelle pour me dire que Nadia va beaucoup mieux et qu’elle a été très heureuse de me voir.
Partie avec les étudiants à Chartres, et avec Jean, je la porte dans ma prière. La vie prend un autre tour… Nous décidons de nous marier lors d’un long week-end à la montagne avec des amis de la communauté catholique de la fac. Mon espérance n’a pas été vaine…
En octobre, avec l’aide de l’assistante sociale et d’une amie, Nadia et Farida sont demoiselles d’honneur à notre mariage aux Invalides. Tellement heureuses, à leur retour à l’hôpital elles remettent leurs robes pour jouer aux princesses…
La médecine a fait des progrès, le service où elles séjournaient a été fermé, leur état de santé s’était beaucoup amélioré et leur famille les a reprises.
L’année suivante, nous sommes allés à Pâques à Lourdes toujours pour aider, en couple…. Et prier la Vierge, car les médecins nous avaient dit que nous aurions du mal à avoir un enfant. Nous nous sommes baignés à la piscine et un an après naissait notre première fille, Véronique.
Marie, Merci ! et tout au long de notre vie, avec ses hauts et ses bas, tu as toujours porté notre espérance.
« Si l’espérance t’a fait marcher plus loin que ta peur, si l’espérance t’a fait marcher plus loin que ta peur, tu auras les yeux levés, alors tu pourras tenir jusqu’au soleil de Dieu »
(M. Scouarnec, J. Akepsimas)
07 décembre 2025